L’impact de la mise en ligne freemium sur les ventes en librairie
Lors de la journée d’étude SO PUR du 26 septembre 2024 ont été dévoilés les premiers résultats de l’étude SO PUR sur l’impact de la diffusion numérique sur les ventes papier. Avec cette conclusion générale : le libre accès immédiat freemium ne nuit pas aux ventes en librairie.
Pour rappel, cette étude couvre l’ensemble des ventes du catalogue des PUR (hors beaux-livres et manuels) depuis 2012, avec un panier d’étude plus restreint de 226 ouvrages. Ce panier couvre des réalités diverses de l’édition numérique : des accès ouverts, fermés ou freemium ; des délais de mise en ligne longs ou courts après la sortie en librairie ; des expositions en ligne qui se comptent en décennie, en années ou en mois ; des livres concernés par des opérations exceptionnelles (licence nationale Istex ou libération expérimentale avec Knowledge Unlatched par exemple) ou des opérations de rétro-numérisation.
L’étude quantitative est complétée par une étude qualitative à partir d’entretiens semi-directifs menés auprès de 11 lecteurs et de lectrices de livres des PUR.
L’étude est menée par les Presses universitaires de Rennes et OpenEdition, avec comme partenaire le service Études et recherche de la Bibliothèque publique d’information. Ce sont justement Damien Day et Christophe Evans de la BPI qui en ont présenté les premières conclusions.
Le support de présentation est disponible sur Nakala ici : https://nakala.fr/10.34847/nkl.a18bqqse.
L’étude n’est pas encore finalisée. Il reste des chiffres à préciser et des données à consolider, ainsi qu’un important travail de mise en forme. Elle sera disponible d’ici la fin de l’année.
La dynamique de vente du papier
Le profil des ventes papier des livres du panier est du même type que celui des ventes papier des livres du catalogue qui n’ont pas de version numérique : un important pic de vente à la sortie du livre suivi d’une longue traîne.
La similarité de vie commerciale entre les livres du panier et ceux du catalogue n’ayant pas de version numérique indique qu’il n’y a pas d’effet visible des mises en ligne.
Des destins commerciaux complémentaires
La dynamique de revenus du numérique ci-dessous montre un profil différent, une progressivité avant le pic et une décrue moins forte après :
Ainsi les profils type du papier et du numérique se schématisent-ils comme ci-dessous :
L’étude n’a pas pu montrer de corrélation statistique entre les deux et encore moins de causalité. (Damien Day)
Damien Day.
Ceci s’explique notamment par le travail de diffusion réalisé en amont de la parution auprès du réseau de la librairie : la vie d’un livre papier commence par une apogée à la date de l’office, constituée d’un côté par l’important travail commencé 6 mois avant et de l’autre côté par les ventes dans les mois qui suivent la parution.
La version numérique se déploie ensuite au fur et à mesure dans les bases de données, les outils d’acquisition des bibliothèques et les réseaux de diffusion numérique. Le pic des revenus est ainsi décalé dans le temps.
Il est à noter que ce profil se retrouve quelles que soient les modalités de mise en ligne (décalage ou pas par rapport à la sortie de la version papier, ouverture en libre accès ou pas). Cet enseignement de l’étude constitue une petite surprise, l’hypothèse initiale de la constitution du panier était que les modalités de mise en ligne allaient impliquer des destins différents. Il resterait tout de même à préciser ce résultat sur le libre accès tout format immédiat.
La coexistence des deux diffusions a donc plutôt tendance à additionner les revenus plutôt qu’à les mettre en concurrence. C’est notamment ce qu’il reste à valider dans la suite de l’analyse des chiffres, à la fois pour la période des 2 premières années de vie commerciale et pour ce qu’il est convenu d’appeler la longue traîne.
Des usages additionnés
Ceci se trouve en cohérence avec les usages tels que montrés par les entretiens qualitatifs. La place importante de l’ouvrage papier en première lecture est hybridée par des usages du numérique constitués souvent de lectures plus ciblées et utilitaires (bibliographie, citation, lecture plus rapide…), étalées dans le temps.
J’essaye d’acheter ou d’obtenir les livres quand je veux lire de A à Z, sinon je consulte beaucoup de livres grâce à des portails comme Cairn ou Open Edition.
Une réponse lors des entretiens.
Limites et perspectives de l’étude
Cette étude a un caractère exploratoire et elle esquisse elle-même des perspectives de travail :
- tester sur des échantillons aléatoires,
- tracer des « vies » d’ouvrages particuliers, notamment en y intégrant des données d’usage,
- compléter l’enquête qualitative (libraires, nouveaux lecteurs, lecteurs occasionnels …),
- prévoir un recueil de données standardisées permettant dans le futur de reproduire l’étude.